Vers une société déresponsabilisée : causes et conséquences via le prisme des retraites

« Je ne vais pas appeler le médecin pour si peu, il va me mettre en arrêt et ce n’est pas le moment. »
« J’ai droit à 5 jours enfant-malade. »
« On se marie cette année, c’est pour les impôts.
« Je suis piéton, je suis prioritaire, tant pis pour lui. »
« Non, je ne vais pas demander de l’aide, d’autres en ont plus besoin que moi. »
Nous avons tous déjà entendu ces phrases toutes faites, qui ont toutes à voir avec le rapport qu’entretient un individu avec le collectif. Elles sont aussi le reflet de la valeur qu’accorde un citoyen aux dispositifs sociaux et civiques mis en place dans nos sociétés, fruits de la participation de tous.
 
« Le paiement valorise le service rendu » est un adage dont j’ai à de nombreuses reprises mesuré la justesse. Plus on dégrade dans l’esprit et le cœur des gens la valeur d’un bien ou d’un service, plus on favorise sa dépréciation et plus on contribue à la déresponsabilisation et au désengagement. Parfois, il ne reste que le prix d’un ticket de métro pour faire en sorte que tout le monde se souvienne de sa préciosité de ce mode de transport. En vouloir la gratuité est un non-sens économique et civilisationnel.
 
Justement, dans une étude sur les inégalités de richesse aux États-Unis, conduite par Sylvain Catherine @sc_cath (Wharton), Max Miller @mjmill611 (Harvard) et Natasha Sarin @NatashaRSarin (Yale), et dont j’ai eu connaissance via @Cobra_FX_ (merci !), plusieurs éléments viennent appuyer l’assertion selon laquelle la dégradation de la valeur des choses fragilise une société et appauvrit les gens.


Les auteurs démontrent, preuves à l’appui, que les inégalités de richesse, au pays de l’oncle Sam, n’ont pas vraiment augmenté au cours des trois dernières décennies, contrairement à ce qui est véhiculé par des économistes et ONGs surmédiatisés.

 Sylvain Catherine avance que : « Si l’État prend une partie de votre salaire et vous la restitue lorsque vous prenez votre retraite, votre incitation à épargner vous-même pour la retraite diminue. Cet effet de substitution est plus significatif pour la classe moyenne. Plus ces programmes sont importants, plus les mesures d’inégalités de richesse qui négligent leur valeur s’aggraveront… en apparence. Cela peut conduire à un cycle où les mesures d’inégalités se détériorent à mesure que davantage de politiques destinées à lutter contre ces inégalités sont mises en œuvre, incitant à demander encore plus de telles politiques.« 
 
Voici qui est très cohérent avec les observations que chacun peut faire, qu’intuitivement nous savons justes, et qui touchent à, je crois, ce point de bascule qu’ont franchi les sociétés occidentales. Il est la cause majeure de nos difficultés, peut-être même le coup fatal qui pourrait faire que nos pays s’effondrent. Car la part de ceux qui estiment qu’une partie de leur vie dépend de l’État (ou de tiers) en oubliant qu’elle dépend d’abord d’eux-mêmes, et qui nient l’effort collectif que cela requiert, ne cesse de croître.
 
Cette illusion de l’argent facile, alimentée par l’ignorance de nombreuses réalités, autorise les abus et éloigne un nombre croissant d’individus de la valeur des dispositifs financés par le travail de tous. C’est ce qui déresponsabilise, et c’est aussi ce qui appauvrit.
 
Le coût du financement de la retraite, des dispositifs sociaux, d’un nombre considérable d’associations, d’ONGs, de médias, de syndicats n’est pas que financier, il est aussi sociétal, avec des effets indirects pernicieux sur la cohésion sociale, la qualité des liens intergénérationnels, les clivages et les divisions, les fractures que nous constatons tous, et la progression du populisme.
 
Depuis plus de deux décennies, puisqu’un nombre croissant de personnes ont un intérêt direct à ce qu’il en soit ainsi, car leur vie entière dépend de ces dispositifs et de leur multiplication, aider son prochain est devenu un business florissant, dont l’apparente et trompeuse vertu contribue largement à l’inversion de valeurs à laquelle nous assistons. Et pour cause. Puisque, globalement, nous avons réussi à aider tout le monde, ceux qui vivent de ce confortable commerce sont allés chercher très loin ce qui permet de l’alimenter. Les moins adapté et les délinquants sont devenus des victimes d’une société qualifiée d’injuste, méritocrate et raciste, il faut donc les aider. L’individu n’est plus responsable de rien, c’est devenu l’objet docile de tous les fantasmes.
Le phénomène s’étant propagé, et puisqu’il y a suffisamment d’électeurs pervertis à ces idées, des théoriciens et les commerçants de cette sinistre philosophie ont été élus à l’Assemblée nationale.
C’est tabou, mais pour un très grand nombre d’associations et d’ONGs aujourd’hui, le boulot consiste essentiellement à noircir le tableau, diaboliser la France, taper sur les entreprises, dramatiser les choses, afin d’obtenir sinon le développement des financements, à minima leur maintien. Il est aujourd’hui infiniment plus facile de financer des associations qui promeuvent des idéologies wokistes, que d’autres qui travaillent dans le secteur de la protection de l’enfance, par exemple, sujet ô combien en souffrance depuis plusieurs années.
 
Malheureusement, très rares sont les hommes ou femmes politiques capables de mettre les pieds dans le plat et de dénoncer ces dérives. Le risque d’un bad buzz médiatique est beaucoup trop élevé.
 
Ajouté à la baisse de natalité, qui va impacter directement la part des actifs, les indicateurs ne sont pas bons. Lire à ce titre le point de vue avisé de David Lisnard David Lisnard publié en janvier dans @Le_Figaro :

Il est évident que si un grand média de service public comme Radio France, et plus particulièrement France Inter, continue à glorifier des économistes idéologisés comme Thomas Piketty et Thomas Porcher en les mettant face à l’excellent Dominique Seux que des « humoristes » de la radio s’amusent à caricaturer tout au long des chroniques, nous n’allons pas avancer vers une meilleure prise en compte des réalités.
 
Changer de paradigme nécessite un courage que le déni des réalités ainsi que la richesse de la France ont longtemps permis à ceux qui n’en avaient pas de cacher. Il est à craindre pour eux, et à espérer pour le plus grand nombre, que ce temps soit révolu.

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