L’été arrive, et avec lui, la chaleur. Et bouleversements climatiques obligent, la canicule a déjà commencé à sévir. Ainsi que la surchauffe médiatique. Voilà qu’on s’étripe sur la climatisation dans les écoles, les logements, les bâtiments publics. Fallait-il la déployer ? Fallait-il attendre ? Faut-il s’y plier ? Est-ce raisonnable ? Écologique ? Le peuple souffre, les enfants transpirent, les vieux suffoquent, mais certains trouvent encore le moyen de douter.
Mais derrière ces débats, il y a autre chose. Une lutte plus profonde. Une volonté à peine voilée de faire mal pour « éduquer ». Car oui, ne nous y trompons pas : ces interdits, ces lenteurs, ces entraves ne sont pas des erreurs. Ils sont voulus.
Il ne s’agit pas seulement d’éviter des gaspillages ou de penser la sobriété. Non. Il s’agit de faire comprendre au peuple qu’il doit changer. Qu’il doit souffrir, pour intégrer que le monde ancien doit disparaître. Que sa voiture, sa maison fraîche, sa liberté de circuler ou de se reposer… sont des privilèges qu’il doit apprendre à perdre.
De là, les ZFE absurdes. Les feux rouges automatiques qui ralentissent des voitures déjà lentes. La suppression volontaire des zones d’arrêt pour les bus, qui oblige à des arrêts en pleine voie, pour bien « emmerder les automobilistes », comme certains élus le disent en privé. Tout cela pour les forcer à changer, par contrainte, jamais par conviction ou raison.
C’est l’idéologie punitive : faire plier par la douleur là où l’intelligence et l’expérience ne cèdent pas. Et surtout, éviter à tout prix que le réel vienne contredire la fiction. Car s’il devenait trop facile de se déplacer, trop simple de se rafraîchir, trop logique d’utiliser le nucléaire… alors leur utopie s’effondrerait, et les raisons mêmes de leur existence, souvent confortable, s’évaporeraient.
Voilà pourquoi ils haïssent la climatisation : parce qu’elle fonctionne. Parce qu’elle soulage. Parce qu’elle permet au réel de tenir et qu’elle ne change rien aux changements climatiques.
Voilà pourquoi ils ont fermé Fessenheim, alors qu’elle pouvait durer encore, produire proprement, sécuriser notre souveraineté énergétique.
Voilà pourquoi ils veulent des efforts, mais jamais de résultats. Ce qui compte n’est pas d’avancer, mais de faire souffrir, pour bien comprendre que nous n’avons plus le choix.
Tout cela est permis parce que les places sont tenues par ceux qui n’ont jamais eu à les mériter.1
Ils n’ont pas construit, ils n’ont pas produit, ils n’ont pas servi.
Mais ils ont compris que, dans une société où le réel s’efface, la conformité et les grandes valeurs aux objectifs irréalisables donnent l’illusion donne l’illusion de la compétence.
Alors, on parle à la place des professionnels et des experts. On décide à leur place. On cache les chiffres, on arrange les récits, et on ment. Effrontément.
Delphine Ernotte, présidente du groupe France Télévision, ne s’en cache même plus : « Nous montrons la France telle qu’on voudrait qu’elle soit. »2
C’est-à-dire : pas telle qu’elle est.
Ceux qui, comme moi, viennent du terrain, voient ce qui se passe. Nous ne sommes pas dans la colère. Nous sommes dans le constat lucide. Cela fait des années que les faits n’ont plus droit de cité. Ce ne sont plus eux qui orientent les décisions, mais une croyance, un dogme, une illusion. Et cette illusion s’impose par la menace.
On ne peut plus remettre en cause un choix technologique sans être traité d’ennemi de la planète.
On ne peut plus questionner une stratégie énergétique sans être soupçonné de sympathies politiques infamantes.
On ne peut plus dire, tout simplement, la vérité, sans être ostracisé.
Mais le réel revient toujours. Et l’expérience aussi.
Il est temps que ceux qui savent, ceux qui ont vu, ceux qui ont fait, ceux qui ont porté le pays reprennent la parole. Non pas pour débattre. Pas pour convaincre ceux qui n’écoutent pas. Mais pour rappeler que la légitimité se gagne. Qu’elle ne s’invente pas. Qu’elle s’acquière en se confrontant au réel, et que ceux qui parlent sans avoir fait quoi que ce soit de probant ne sont que de dangereux idéologues.
Notre pays mérite mieux que des pédagogues en croisade et des discours messianiques.
Il mérite ses bâtisseurs.
Il mérite ses ingénieurs, ses élus lucides, ses enseignants de terrain, ses ouvriers, ses médecins, ses vrais responsables.
Ce pays mérite le retour de l’expérience.
Et cela commence aujourd’hui. Par une ligne claire.
Par la fin du silence.
Par le refus du sacrifice inutile.
Par l’affirmation simple, mais ferme, que la France ne se reconstruira pas dans la chaleur étouffante d’une culpabilité imposée.
Nous n’avons pas à souffrir pour croire.
Nous avons à construire pour tenir.
Qu’est-ce qu’un homme d’expérience ? Un podcast éclairant de Fabien Bizet de la chaine Kosmos.
-
Sébastien Tertrais: Auteur/AutriceVoir toutes les publications Fondateur et rédacteur en chef à OHERIC-Média
- Lire notre article du 12 novembre 2023 : Le chemin de l’enfer, ou le syndrome du Local Jeune pour bien comprendre comment ils ont pris la place des fondateurs et de ceux qui tenaient encore les piliers de ces structures.[↩]
- Audition de Delphine Ernotte à l’Assemblée nationale, le 5 juillet 2023[↩]